Le square du sujet
Jean-Paul Gilson

Une décision « exemplaire » de la bourgeoisie matriarcale (cfr. P. Legendre) qui régit les prétoires en Belgique, m’interdit de circuler librement en Europe. Nous savons tous que le Nom-du-Père est inconscient et que sa figure ne prend consistance que lorsqu’il est bafoué voire « humilié ». Je vous propose ci-après le témoignage de ce que comme la garde, je ne me rends pas. « Elle meurt, dit-on, mais ne se rend pas ». N’est-ce pas là le lot de la fonction paternelle ?

Dès le Séminaire IV, de petits dessins commencent à vivre dans le séminaire de Lacan. Des triangles, des arcs de cercle, des droites se croisent et se recroisent à la manière d’une trame qui localement se tisse sans que nous puissions en saisir ni l’enjeu ni même le métier qui la tisse. Des tétraèdres surgissent aussi qui supportent le discours de Lacan.

La nécessité d’écrire est patente, sa plus value sur la simple pensée, indiscutable ! Il serait faux de croire qu’un souci didactique est à l’origine de cette topologie en train de naître et qui relaie les anciennes intuitions de Lacan lors de sa découverte du stade du miroir.

Quatre points d’ancrage semblent nécessaires au sujet pour être manifeste. Lacan leur a donné le nom de point de capiton depuis son séminaire sur les psychoses.

Freud lui-même dans un petit article intitulé « À propos de la formulation de deux principes de la vie psychique », laissait entendre que ces deux principes devaient en quelque sorte concubiner avec une dyade pulsionnelle, constituant un quadrillage dont nous avions proposé l’écriture voici près de vingt ans et rapporté dans notre livre sur la topologie de Lacan (1994, p.52)

« En effet, écrivions-nous, lieben und arbeiten (aimer et travailler), les deux champs de l’activité humaine concernés par la psychanalyse aux dires mêmes de Freud, se mélangent en une série de points-carrefours surdéterminés, attendant qu’une coupure leur restitue leur champ propre, soumis qu’ils sont aux pulsions du Moi et aux pulsions sexuelles. Ces dernières sont elle-mêmes intriquées au langage qui les trame comme un tissu. Mais on pourrait également les faire dépendre d’un plus ou moins de plaisir ou de réalité ».

Nous pourrions imager la chose d’une matrice à double entrée :

Il s’agirait alors de concevoir l’intrication de ces quatre vecteurs dont on mesure immédiatement les convergences électives puisque la pulsion sexuelle et le principe de plaisir sont faits pour aller de concert ainsi que la pulsion de vie et le principe de réalité. Il saute aux yeux que cette dualité dédoublée peut former une trame élémentaire et installer les repères de quatre points-nodaux comme les appelait Freud.

Ces quatre points se retrouvent à plus d’une occasion dans l’œuvre de Lacan à commencer par les croisements essentiels de son graphe :

On sait que plus d’une fois, Lacan a expliqué à quel point se trouvait nécessaire de fonder la subjectivité sur la présence de ce quadripode ici identifié à la rencontre de l’Autre du langage (A) en 1 ; de la dépendance du sujet à la demande (  D) en 2 ; à la non réponse de l’Autre, S (), en 3 ; au retour différé de la signification enfin s(A), en 4 – différé sous la forme curieuse et imaginaire du fantasme ( ), en 4 bis.

Il n’est pas impensable d’articuler ce quadripode à la fonction des noms du père voire d’égaler ces derniers à chacun de ces points-nœuds.

Il ne doit pas être impossible à quiconque d’admettre la superposition du graphe et de la trame constituée à partir des deux principes de la vie psychique (in Résultats, idées, problèmes I, PUF)

Identifions le principe de plaisir à la fonction discursive inconsciente dont on sait que jamais Freud n’oubliera de la rapporter aux processus primaires de plaisir (ligne 3-2).

La deuxième, parallèle, sera celle du discours symbolique grâce à qui s’étoffe la réalité (ligne 2-1). Ces deux courbes parallèles se trouvent crochées par la boucle réversive de la pulsion laquelle fait le tour de son objet sans l’enserrer.

Pulsion de vie dans sa courbe ascendante sous la forme de cette demande faite à l’Autre avant que son refus possible n’élève ladite demande au statut de désir dont chacun peut mesurer le lien avec la pulsion sexuelle.

Dans notre commentaire nous restons freudiens en ce sens que le texte de Freud indique qu’il faut penser un dégagement progressif des deux pulsions (p. 139) et de même un avènement distinct des deux principes (p. 136-137) à partir d’un temps confondu.

Il semble bien qu’un même vœu articule la production élémentaire de ces premiers temps de la topologie lacanienne. Celle de répondre au vœu freudien lui-même qui était de cerner la perte de réalité sensible tant dans la psychose que dans la névrose.

Avançons donc que dans le graphe, si Lacan a tenté d’écrire ce problème soulevé par Freud en traçant un premier vecteur qui relie le moi à son idéal, c’est dans le bouclage du graphe comme tel et sous les vocables de réalisation subjective que nous retrouvons au mieux dans la formulation française utilisée par Freud dans le texte déjà cité perte « de la fonction du réel » et non pas de la Realität, encore moins de la Wirklichkeit (effectivité).

Au point que nous pourrions écrire, en anticipant notre point de chute qui sera nodal, qu’avec le vecteur de la satisfaction moïque, un homologue s’est cloné dans le champ inconscient sous forme de plan du fantasme et que nous pourrions tout aussi bien relier entre eux.

Sur ce point arrêtons-nous un instant.

Il est possible ici même d’introduire une première réflexion concernant le statut de l’écriture puisque c’est bien le thème de notre débat dans ces journées. L’opération mentale, de pensée qui depuis des années maintenant me pousse à superposer le texte freudien au texte lacanien est-elle induite par le fait que ces deux discours sont préalablement écrits ou bien au contraire, est-ce d’écrire à leur propos qui fait surgir de la structure un réel certes temporaire mais cependant inaperçu jusqu’alors ? Il n’est pas certain en outre, que la dimension conceptuelle en tant que telle de la pensée soit suffisante à produire une pareille écriture même si elle en contient les germes. Possible que sans une opération résolue de formalisation fut-elle rudimentaire, nous ne puissions apercevoir le très curieux harponnage de la réalité par le mental. Accordons-nous – pour faire taire les critiques – que le Réel pour sa part, ne surgira que dans les marges de cet accrochage, précisément par « rétivité » structurale.

Encore faut-il se prêter à cet acte d’écriture et ne point le tenir pour acquis d’avance, c’est ce que ne cessait de rappeler notre ami Pierre Souris. Ce fait d’écriture est un acte qu’on actera comme il se doit.

La dimension de l’écriture ne se limite pas à une simple représentativité du langage verbal ou pensé. Il y a plusieurs couches d’écriture : biréférentielle, planaire, la nodale, virtuelle et ternaire.

On se souviendra que Lacan lui-même dans « la Lettre volée » avait présenté les effets d’une écriture composée d’un triple codage grâce à laquelle il isolait la séquence muette d’un battement subjectif, autrement présentifié dans l’apologue des trois prisonniers par les trois temporalités de l’instant (de voir), du temps (pour comprendre) et du moment (de conclure). Il aurait tout aussi bien pu parler de cette écriture projetée sous formes de disques blancs et noirs dans le dos des dits prisonniers.

Aurait-on, sans cette écriture, pu penser la sortie de ce sophisme?

En rassemblant dans les écrits multiples de Lacan les thèses sous-jacentes à ce qu’on appelle la fonction du signifiant, j’ai pu repérer un double mouvement de pensée souvent occulté par ce fait que l’usage de la parole en analyse semble donner une préséance à l’ordre verbal et parlé dudit signifiant. Il n’en n’est rien cependant puisque la définition reconstruite de ce matériau devenu lacanien m’a permis d’isoler une séquence étonnante et sur laquelle les psychanalystes s’appuient peu préférant la non-définition-bateau du « c’est ce qui représente un sujet pour un autre signifiant ». Je la livre sans plus tarder :

La marque d’une trace effacée pour tromper l’Autre et regagnée par le sujet sous forme de savoir.

Robinson encore et toujours !

La trace : ce sont les pas du sauvage, comme ceux de la gazelle sur le rocher, encore invisibles aux yeux du changeur. Elle est première, primordiale et fait effraction dans le lissage du sable mouillé d’où s’est retirée la mer, fracture d’écrit dans ce qui s’lave. Indicible fossette qui érotisera à jamais le regard énamoré de l’amant tout aussi bien.

Effacement ensuite pour ne point donner aux pirates qui débarquent sur cette île qui leur sert de repaire l’éveil du vivant qui s’y cache et menace leur intimité de recel, mystérieuse et secrète.

Autre suprême en méchanceté comme s’est plu à le décrire Daniel Defoë.

C’est ici seulement que la vérité entre dans la danse sous la forme de cette tromperie qui laisse entendre qu’un danger plane sur ceux qui manifesteraient par trop leur existence de vivant, ce que nous nommerons, jouir de la vie.

Du coup, le sujet rentre en son campement et inscrit sur le calendrier qu’il se confectionne comme repère – temporel celui-là : Vendredi, soit le savoir de cette trace d’une marque effacée.

Doit-on penser que l’hystérique fait à rebours ce chemin qui conduit le petit d’homme de la marque au savoir et déconstruit le savoir du maître qui règne toujours celui du signifiant pour en rappeler la marque originaire exquise ou traumatisante. Sens à donner aux stigmates et autres conversions ? Sont-ce les hystériques qui donnèrent à Freud l’idée d’une double inscription, l’une de pur frayage et l’autre de trace mnésique du signifiant ?

Est-ce avec la marque que nous écrivons ou avec la trace d’effacement comme Lacan semble l’indiquer par les multiples effaçons ?

D’une certaine manière, l’écriture semble résulter de la marque qui doit conjurer un plus grand danger que tout, celui d’exister et que nous devons cacher par l’efface dont la cursive serait l’enluminure.

Qu’en est-il alors de la topologie de Lacan, est-ce une écriture ?

Pour le moins, oui !

Marque d’une trace effacée, trace du sujet qui s’évanouit quand la jouissance du vivant fait effraction au cœur de la répétition symbolique, de la virtualité de l’imaginaire ou de l’inertie du Réel.

On se souviendra qu’au beau milieu de ses écritures contournées, Lacan inscrivit sa signature, (tout comme Duchamp sur les havanes distribués lors d’une réception à New York avant de les élever au rang évanescents de ready made en demandant à chacun de les fumer avant de sortir !!!).

« Le nœud de Lacan », dit-il lui-même de lui-même.

Un peu comme si au terme d’un écrit, ici fait de nœuds, il apposait sa signature. Sur quoi ? Sur ce qui signe subjectivement le trajet devenu nodal de ce qu’il faut entendre par réalisation subjective à la manière de Lacan

On peut y lire pour autant que nos graphes précédents soient décalqués de ce troisième, on peut y lire le rectangle central et la boucle réversive du graphe du désir.

La réalisation subjective est constituée par le raboutage des vecteurs du premier graphe à cette boucle qui donc ne se ferme pas ni ne s’épuise dans une circularité que Lacan appelait circuit du fantasme.

Selon la lecture que je propose, le nœud (?) ici proposé par Lacan comme nœud dit de lui, nœud de Lacan, réussirait à produire l’écriture de la tentative freudienne réécrite par Lacan.

Il me paraît évident que le nœud en tant que tel, par ses passages dessus-dessous mais aussi par sa tenue nodale, réalise comme savoir ce que l’écriture comme signifiant représente pour tout parlêtre, la marque d’une trace effacée.

Nous pourrions même poursuivre le commentaire parallèle en faisant remarquer combien l’inhibition à écrire et l’ennui à lire sont les résultante de cet interdit par où le sujet intente une tromperie en direction de l’Autre, ce que Lacan appelait non pas résistance mais défense du sujet.

Opération de continuité, de l’UN au départ de deux paires signifiantes que l’écriture noue.

Conclusions

Voici donc quelques réflexions sur ces problèmes d’écritures en tant qu’ils se trouvent condensés dans cette quadrature des cercles borroméennement noués dans notre dessin. Quadrature qu’une présentation tétraédrique eût pu nous montrer différemment.

De Freud à Lacan, une écriture nous est proposée en filigrane des discours qui portent la psychanalyse. Certes cette écriture peut nous paraître non nécessaire comme sont hors-jeu les écritures de contrats que se passent les maquignons sur les champs de foires aux bestiaux. Une loi non-écrite assortie d’une frappe dans la main vaut ici contrat écrit.

Il devait en être de même dans la Chine ancienne avant que les monceaux de carapaces de tortues ne témoignent des marques des premiers commerces entre les humains. Il est peu probable que ces écritures assurent une garantie supplémentaire au statut de vérité qu’inaugure la parole dans le dialogue humain, à moins de concevoir l’écrit comme une libation offerte aux dieux trompeurs pour garantir le crochage d’un désir et de la réalité. Voici une petite histoire pour illustrer .

Durant les années où Lacan « contrôlait » mes cures, j’avais coutume de prendre dans le train de retour vers Bruxelles le repas du soir proposé aux voyageurs, occasion de multiples et surprenantes rencontres. Au cours de l’une d’elles, faisant face à l’inconnu qui partageait fortuitement ma table, la conversation s’engagea sur la langue chinoise dont je possédais quelques rudiments. Mon vis-à-vis, ancien ambassadeur de Belgique en Extrême-Orient, m’entretenait de la vivacité et de l’extraordinaire subtilité des peuples chinois.

« Ainsi, me racontait-il, quand un commerçant vietnamien désirait traiter une affaire d’argent à Hong-Kong, il lui était parfois difficile de se munir de l’argent nécessaire, en « devises » locales, pour réaliser sa transaction, et un certain nombre d’obstacles politiques et monétaires semblaient rendre cette aventure bien périlleuse. Aussi traitait-il avec une banque du pays où il avait toute créance pour obtenir, une fois à destination, les sommes nécessaires à ses transactions. En aucun cas, il ne s’agissait de traites à tirer, chèques à valoir, lettres de crédit, mais bien d’un simple morceau de papier-journal déchiré au quotidien local et sur lequel un agent de change avait inscrit l’adresse de son correspondant chinois à Hong-Kong. On imagine l’incrédulité de notre commerçant qui néanmoins pouvait vérifier à chaque fois l’efficacité du système. Car une fois arrivé sur place, après avoir tendu son bout de papier journal-récipissé, il avait la surprise de voir l’employé sortir d’un tiroir, le quotidien d’origine, écorné de la partie qui pouvait maintenant le compléter. »

Par quel mystère ce quotidien était-il parvenu à destination avant le mandaté, nul ne le saura, mais ce fait garantissait la transaction. Ainsi donc, redoublant l’inscription manuscrite que portait le morceau-récipissé, sorte de preuve rudimentaire de la solvabilité du demandeur, un circuit parallèle existait qui accréditait littéralement le porteur de la quittance, un peu comme la signature du gouverneur de la banque centrale garantit la valeur d’une monnaie fiduciaire ou billet de banque. A ceci près qu’il n’est guère courant de déchirer des banknotes pour en obtenir la garantie. Variation sur le tessère des grecs diront les lettrés : la bonne foi se trouve fondée du seul recollement des morceaux séparés de la pièce initialement brisée en deux.

Cet apologue déborde largement le cadre économique et humain pour lequel il me fut conté. Il eut une suite : car voulant connaître le nom et l’adresse de son interlocuteur ferroviaire, (c’est à dire moi-même) mon dîneur d’ambassadeur les reçut, en guise de carte de visite, ici encore, écrits sur un morceau du journal du jour grâce auquel je comptais occuper ma pensée au long du voyage de retour vers Bruxelles. Si notre homme, pareil au changeur de Hong-Kong, sait déchiffrer ce qui lui revient comme signifiant, dans cette ironie calculée, il aura certainement reconnu, glissé dans la page de garde d’un livre de Simon Leys que je lui fis parvenir quelques jours plus tard – pour qu’il sache l’origine de mon intérêt pour la Chine – le reste du journal qu’il avait écorné lui-même et déchiré pour y inscrire mon nom. Saura-t-il faire le cheminement inverse et remonter jusqu’au patronyme du sujet qui se révèle en cette aventure un peu tordue ? Je ne le saurai jamais mais je gage que, décodée, cette leçon eût valu pour lui bien plus qu’un fromage sans doute, (fût-il celui qui se prend au dessert) et qui exige maintenant sa lecture et son intelligence dans la suite de ces lignes.

Et bien plus, l’acte gratuit de lui faire parvenir l’authentification de mon intérêt, sous la couverture de Simon Leys, pourra-t-il réellement modifier la donne ici et vaincre pour lui la suspicion qui pesait sur ma qualité de psychanalyste du fait de ce que mon vis-à-vis appelait mon apparence.

Qu’avons-nous à lire dans cette petite aventure ?

Tout simplement que la fonction de la parole n’exige pas dans sa réalisation que le problème traité soit nécessairement crucial pour le genre humain. Car ce que je mis en exergue pour mon interlocuteur pourtant passé maître en « pourparlers » diplomatiques, était une dimension de la parole qui dépassait de beaucoup les avals bancaires, tout autant que la somme d’information qu’ils véhiculent. Je lui signalais que quoiqu’il en pense, même en ce monde policé et faussement désintéressé de la diplomatie, la parole, dans quelqu’exercice où elle s’énonce, se prend toujours pour objet de sa propre visée.

Et surtout que le signifié de cette auto-référence est ce qui s’incarne dans un acte ! Ce qu’incarne l’écrit.

Nous ne le savons pas toujours, mais les écrivains le pressentent à chaque détour. Et c’est exactement ce que l’expérience analytique nous montre : comment au fur et à mesure que se déploient les cercles de l’association libre, se resserre le noyau de la parole, vers son inscription possible. C’est ce resserrage tout spécifique à la psychanalyse qu’il nous faut décrire maintenant.

La déchirure dans le papier journal est la jouissive effraction d’une trace qui fait littoral dans l’unicité de la page-plage du quotidien. C’est ce dont se ressource toute lettre d’y trouver sa litière comme Jacques Lacan le premier l’a formulé.

Ainsi un doigt sur une joue peut-il rompre la jouissance béate du vivant pour y introduire la trace de la jouissance de l’Autre. Quelle trace d’effraction est visée par le marquage articulé que mes quatre figures de topologie actualisent pour vos yeux ? Rien d’autre que l’entrée du discours freudien sur la scène des échanges humains. Cette entrée fracassante, aussitôt effacée se devait d’être regagnée dans son vivant le plus acéré (« restaurer le soc tranchant de la vérité »), ce qui s’appelait retour à Freud.

Lacan nous en propose une écriture, savoir-moyen-de-jouissance qu’il arrache à la volonté non pas de savoir, ni de puissance de l’Autre mais à sa suprême méchanceté obscurantiste et bête. Scilicet, déguisa-t-il sa pointe ! L’Autre en chacun n’en voulut rien savoir, dénégation qui copule avec la Verleugnung et la topologie fut mise à l’index.

Acceptez que ce jour je vous fasse lecture d’une autre petite aventure c’est celle de ce petit carré magique que je retrouve dans le texte freudien « à propos de la formulation de deux principes de la vie psychique ». Il faudrait reprendre toute l’élaboration qui mena Freud à ne retenir que deux fois deux paires de signifiants dans l’analyse qu’il tenta du monde pulsionnel et des principes qui le régissent. Zerlegung des états pulsionnels, le concept n’a pas vraiment fait fureur mais j’aime ce démontage, cette décomposition binaire des pulsions et des principes qui les régissent. Cette effraction freudienne dans le grand bric à brac du vivant s’est effacée comme beaucoup de choses et Lacan nous la remit au goût du jour dans son graphe dit du désir où il tendait à retrouver l’unicité de la réalisation subjective sans y parvenir autrement que sous la forme répétitive du fantasme (voir le graphe du désir). Le même carré magique est lisible au cœur de ce graphe tout comme il l’est dans l’élaboration de ce nœud curieux où nous est peut-être donné à lire – pour ceux du moins qui ne veulent point se trouver du côté des autres trompés –, et qui semble réaliser cette quadrature du cercle que le circuit du fantasme répétait avec insistance sans pouvoir se traverser. Est-ce à dire que le nodal est une version analysée dudit fantasme et que cet objet a peut se trouver dans une autre position du fait de la cure ? Celle de rétablir la continuité « filaire » de la vie, du sexe, du plaisir et de la réalité. Le nodal ici réécrivant, inscrivant le fantasme dans le savoir y faire avec les nouages ? Savoir-y-faire avec une écriture.

Ceci pour relancer la question l’extraction de a en fin de cure et de sa réélaboration dans la Passe, ainsi qu’en parla R. Lew à Bruxelles à une époque où je pouvais encore me faire entendre en Europe.

Je rappelle Shi Tao.

« Quand bien même l’Homme n’en saisirait pas l’accomplissement... »

Parlait-il de notre écriture topologique ?

« Car la suprême simplicité s’est dissociée »…

Parlait-il déjà de la Zerlegung freudienne ?

« …aussi la Règle de l’Unique Trait de Pinceau s’est établie. »

Mon unicité filaire ?

« Cette Règle de l’Unique Trait de Pinceau une fois établie, l’infinité des créatures s’est manifestée. C’est pourquoi il a été dit : « Ma voie est celle de l’Unité qui embrasse l’Universel. »

Encore faut-il, ajoute Shi Tao, que les hommes soient dotés d’une grande sagesse pour accomplir ce « don » du Ciel et ne pas être celui qui ne considère que les descendants en oubliant l’ascendance ancestrale. Voilà pour la transmission et son style.

C’est l’homme dixit Buffon.